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Perspectives croisées sur les jumeaux numériques dans la science de l'interceptionce

Perspectives croisées sur les jumeaux numériques dans la science de l'interception

 


Au XIXe siècle, il y avait plusieurs façons de photographier une seule image. À mesure que la capture de l’image s'est précisée, on a commencé à remarquer que des photos fixes successives - ou des points de données - empilées les unes à la suite des autres à raison de 10 à 12 images affichées par seconde pouvaient simuler un mouvement.

Les années 1900 ont été le témoin de nouvelles avancées technologiques – les films muets, diffusés à un débit de 16 à 24 images par seconde, suivis de la vidéo fluide à 60 images par seconde – et aujourd'hui, les vidéos qui peuvent atteindre un débit de 10 000 milliards d'images par seconde. Au fil du temps, des scientifiques et des ingénieurs sont parvenus à la conclusion que la capture d'images à de hauts débits pouvait permettre de prévoir les prochaines étapes ou l'avenir à court terme des systèmes complexes.

Comme les cinéastes, les médecins et les scientifiques utilisent des points de données individuels pour reconstituer une représentation virtuelle de la santé d'une personne. Mais en général, un médecin collecte les données biométriques et celles issues des biomarqueurs d'une personne tous les 12 mois, lors de son bilan annuel, et les replace dans le contexte d'une vie. C'est comme si l'on prenait plusieurs photos et qu'on les empilait pour simuler le mouvement, comme le faisaient les cinéastes de la fin du XIXe siècle.

Aujourd'hui, les médecins et les chercheurs ont la possibilité de collecter les données des patients à chaque milliseconde de la journée plutôt qu'une fois par an, en faisant appel aux capteurs qui existent déjà. Cette collecte et cette analyse constantes de données pourraient-elles aider les médecins à prédire l'évolution de la santé d'une personne dans les semaines, les mois ou les années à venir ? C'est ce que les chercheurs de Janssen tentent de découvrir.

Place aux jumeaux numériques.

Un article en 2017 paru dans le magazine Forbes  décrit un jumeau numérique comme « un modèle virtuel d'un processus, d'un produit ou d'un service » et un « pont entre le monde physique et le monde numérique. » Bien que les jumeaux numériques soient utilisés dans de nombreux secteurs, ils présentent un potentiel particulièrement intéressant dans le domaine de la santé.

Chez Janssen, le World Without Disease Accelerator (WWDA) a pour mission de prédire et de prévenir la maladie au stade précoce. En créant des jumeaux numériques de la santé d'une personne avant et dès l'apparition de la maladie, nous avons la possibilité d'identifier les prédicteurs de l'incubation et de la progression de la maladie au stade précoce. L'obtention du volume et du détail de données nécessaires à la création de jumeaux numériques dans le domaine de la santé passe par l'intégration et l'analyse des ensembles de données de santé traditionnels, comme les dossiers médicaux partagés, en lien avec les données continuellement disponibles grâce aux avancées dans la technologie des capteurs et des appareils mobiles.

Au cours de cet entretien, Patrick Loerch, Ph.D., Responsable mondial du groupe Science des données et biomarqueurs de prévention, WWDA, et Richard Fougere, Vice-président R&D Santé grand public et responsable du groupe Capteurs et dispositifs portables, WWDA, nous expliquent pourquoi ils font confiance au pouvoir et au potentiel des jumeaux numériques dans le domaine de la santé et comment leurs équipes sont les mieux à même de collaborer à la concrétisation de ce concept.

Pourquoi croyez-vous au potentiel des jumeaux numériques dans le domaine de la santé et qu'est-ce qui a poussé le WWDA à adopter cette approche ?

Patrick Loerch : Pour nous, dans le cadre d'un monde sans maladies, l'accent mis sur le jumeau numérique s'inscrit dans une démarche qui consiste à rechercher les maladies à un stade précoce. Les personnes que nous ciblons sont asymptomatiques – celles qui se présentent dans un cabinet médical et qui sont identifiées comme étant « en bonne santé », bien qu’elles  incubent peut-être un cancer ou une autre maladie chronique. Avec les jumeaux numériques, nous serons peut-être en mesure d'éviter les prélèvements de sang et d'échantillons biologiques invasifs sur les personnes « en bonne santé », tout en obtenant le résultat désiré en détectant la maladie à un stade précoce. Comme Bill Hait, Responsable mondial de Johnson & Johnson External Innovation, a coutume de dire : « Dans cent ans, quelqu'un se penchera sur notre siècle et dira : 'Est-il possible qu'ils attendaient d'être malades avant d'agir ensuite ?' »

Richard Fougere : Si vous m'aviez posé la question il y a cinq ou dix ans, je n'aurais peut-être pas accordé beaucoup de crédit à ce concept, car les capacités dont nous disposons aujourd'hui n'existaient tout simplement pas. Aujourd'hui, je suis convaincu que la création de jumeaux numériques est possible grâce à la précision accrue des capteurs et à notre capacité grandissante à mesurer des données en temps réel de manière passive et non invasive, en vue de leur intégration dans des algorithmes.

Pouvez-vous nous donner un exemple de la manière dont vos équipes travaillent sur les jumeaux numériques ?

RF : Par exemple, dans certaines maladies, les personnes à risque peuvent avoir des biomarqueurs dans leurs fluides corporels qui indiquent qu'elles ont une probabilité plus élevée de développer une maladie, même si la personne a l'air « en bonne santé » et qu'elle se sent bien, comme l'a mentionné Patrick. Mon équipe pourrait alors travailler à la mise au point d’un capteur ou d’un dispositif portable (capteur non invasif qui n’interférerait pas dans la vie quotidienne) afin de suivre les fluides corporels d’une personne au cours d’une période donnée, à la recherche des biomarqueurs en question. Alors que les dossiers médicaux traditionnels ou les tests de laboratoire ne capturent qu'un instantané à un moment donné, les biomarqueurs basés sur des capteurs sont capables de détecter en temps réel si cette personne est susceptible de développer la maladie ou non. Cette technologie nous permet de définir plus précisément la fenêtre temporelle dans laquelle nous pouvons intervenir et de retarder la progression de la maladie ou d'en arrêter l'évolution. À ce jour, nous avons déjà pu démontrer la portée clinique d'un certain nombre de nos capteurs.

PL : C’est là que mon équipe chargée de la science des données et des biomarqueurs de prévention entre en jeu. Nous mettons en œuvre des systèmes sécurisés d'intégration et de capture des données et nous concevons les algorithmes tirés des capteurs développés par l'équipe de Rick. Nous intégrons les données du capteur à différentes sources de données qui présentent un intérêt pour la maladie en question, dans l'idéal sur une longue période. En intégrant des données différentes sur les mêmes personnes, nous sommes en mesure de développer un jumeau numérique de plus en plus précis d'une cohorte de patients à partir duquel nous ambitionnons de détecter ou de prévenir une maladie.

Pourquoi Janssen et le WWDA sont-ils bien placés pour faire avancer le concept de jumeaux numériques afin de répondre aux demandes croissantes d'innovation dans le domaine de la santé ?

RF : À y regarder de plus près, Janssen fait partie du groupe J&J, ce qui signifie que nous sommes une entreprise grand public, spécialisée dans les dispositifs médicaux et les produits pharmaceutiques. Le WWDA s'attache à transformer la santé du grand public et à mettre au point des solutions innovantes qui amélioreront véritablement la santé humaine. Mon expérience dans d'autres entreprises m'a appris que l'accès aux compétences pouvait avoir un coût très élevé, en admettant qu'il soit possible. Mais chez J&J, nous sommes dans une position privilégiée, car nous pouvons nous appuyer sur une formidable expérience au sein de l'entreprise, ce qui nous permet d'aborder les jumeaux numériques selon une approche multisectorielle. De plus, grâce aux collaborations externes axées sur les données que l'équipe de Patrick a pu nouer, nous sommes en mesure de réaliser des analyses plus pointues et de mieux réussir dans la formation de nos algorithmes, ce qui nous rapproche de la concrétisation de notre vision.


PL : Je tiens à réaffirmer ce point de vue. Lorsque nous pensons au concept de prévention et d’interception des maladies, la majorité des personnes que nous tentons d'impliquer n’ont eu que très peu de contacts avec le système de santé, pour ne pas dire aucun, car elles ne sont pas encore « malades ». D'où l'utilité d’avoir un segment hybride science et santé grand public capable de comprendre la biologie sous-jacente. En tant qu'entreprise internationale de santé multisectorielle, nous sommes en mesure de nous intéresser à la santé humaine dans son ensemble et de tenter d'identifier l’intervention adéquate pour une maladie donnée – une solution qui peut revêtir différentes formes – un traitement, un dispositif, un alicament ou une application numérique.

Qu'est-ce qui vous motive tous deux à adopter cette approche exclusive ?

PL : Au début de ma carrière, j'ai participé au développement thérapeutique de cellules CAR-T (cellules T porteuses d'un récepteur chimérique) pour le myélome multiple à un stade avancé.  Bien que ce travail ait eu une profonde signification pour moi et qu'il ait été certainement important pour les personnes atteintes d'un cancer à un stade avancé, je suis enthousiaste à l'idée de travailler désormais de l'autre côté. Avant, je traitais la maladie et maintenant, j'essaie d'inverser son évolution et de la prévenir. La possibilité d'y parvenir est extrêmement motivante en ce qui me concerne, et j’ai un attachement personnel à cet objectif. Le concept de jumeaux numériques, tout comme les autres activités menées par le WWDA, pourraient nous aider à ouvrir la voie à un monde sans maladies.

RF : Imaginez que vous ayez la possibilité d'intervenir naturellement dans vos activités quotidiennes, parfois 2 à 3 fois par jour, et de vous mettre ainsi en capacité de vous orienter vers une stratégie d'intervention de santé efficace – stopper la maladie avant qu'elle ne se déclare – grâce à la compréhension de vos données. En théorie, les humains possèdent un potentiel biologique leur permettant de vivre entre 130 et 150 ans, et pourtant, la moyenne de l'espérance de vie est nettement inférieure en raison de la maladie. Voilà ce qui me motive. C'est la possibilité d'aider les personnes à vivre plus longtemps, en meilleure santé et plus heureux.